Une fin en apothéose à Tokyo pour Dicko, Riner et le judo français

Engagés avec l’équipe de France sur le premier tournoi par équipes mixtes de l’histoire des Jeux olympiques, les Parisiens Romane Dicko et Teddy Riner ont écrit l’histoire au lendemain de leurs parcours individuels couronnés de bronze. Victorieux du Japon en finale, ils chipent avec maestria le mot de la fin au pays hôte, intraitable jusque-là avec neuf titres amassés.

Il s’agissait de la finale rêvée, attendue de tous, remake des galops d’essai des trois derniers championnats du monde, tous remportés par le Pays du Soleil Levant. Pourtant, avant de voir Français et Japonais monter sur les tatamis pour ce duel ultime dans un Nippon Budokan qui retenait son souffle, c’est bien plus tôt que les premiers frissons ont fait leur apparition côté tricolore. Menés 1-0, 2-1 puis 3-1 par Israël en quart de finale, il fallait toute la sérénité des deux combattants du PSG Judo – Romane Dicko impériale pour conclure au sol contre Raz Hershko avant que Teddy Riner ne se joue aisément du médaillé olympique de Rio 2016 Or Sasson – pour ramener les deux nations à égalité. 3-3 et un tirage au sort qui renvoyait Margaux Pinot au front, poussée comme jamais par ses coéquipiers, Riner en tête. Et c’est la Française qui trouvait finalement l’ouverture d’un uchi-mata après une minute de golden score.

EDF Dicko JO Tokyo (juillet 2021)Romane Dicko, fer de lance de l'équipe de France par équipes mixtes au huitième jour des Jeux olympiques de Tokyo. © Paco Lozano / L'Esprit du Judo

Un avertissement sans frais qui mobilisait toute l’équipe, renforcée par une Clarisse Agbegnenou encore sur le flow de son titre olympique décroché en -63kg quatre jours auparavant. Les Pays-Bas allaient en faire l’amère expérience, cédant 4-0 sur un dernier point acquis par une Romane Dicko appliquée qui dominait Guusje Steenhuis, multiple médaillée européenne et mondiale, d’un waza-ari. Pas besoin de faire entre en piste Teddy Riner, qui lançait un « on est en finale » en farandole avec les autres membres de l’équipe en attendant le salut de sa jeune camarade du club de la capitale. Grand frère de ce collectif puissant et souriant, le décuple champion du monde n’en perdait pas moins de vue l’objectif terminal du jour. Dans la salle d’échauffement, l’opposition de style était criante entre le sérieux nippon et la décontraction en musique des tricolores, soudés pour réaliser l’exploit sous les yeux des téléspectateurs du monde entier.
EDF Riner JO Tokyo (juillet 2021)

Intraitable en finale, Teddy Riner a apporté le troisième point de l'équipe de France, avec qui il a décroché sa cinquième médaille olympique. © Paco Lozano / L'Esprit du Judo

Le tirage l’avait décidé depuis le début de la compétition, c’était aux -70kg d’ouvrir le bal de cette finale, pour un premier temps fort entre Clarisse Agbegnenou, titrée dans la catégorie inférieure donc, et Chizuru Arai, qui était également allée chercher l’or au terme d’une journée limpide vingt-quatre heures après la tricolore. L’explication tournait cependant vite court puisque, sur deux petits fauchages intérieurs, la Française empochait le premier point avec une autorité déconcertante. Ainsi parfaitement lancé, le trentenaire Axel Clerget, double médaillé mondial éliminé en huitièmes dans sa catégorie des -90kg, doublait la mise en contrant Shoichiro Mukai en mort subite, laissant place à Romane Dicko, qui allait enfin pouvoir se mesurer à Akira Sone, sur laquelle elle avait notamment beaucoup concentré ses efforts avec les entraîneurs du PSG Judo Nicolas Mossion et Laurent Calléja. La double championne d’Europe tenait la distance à la garde jusqu’à mi-combat, avant de céder sur un fauchage puis au sol contre ce petit gabarit qui n’avait pas connu de faille la veille en +78kg pour offrir un neuvième titre en individuels au Japon. C’est donc à 2-1 que Teddy Riner entrait dans l’arène, retrouvant face à lui le tout frais champion olympique des -100kg Aaron Wolf. Mobile et percutant sur ses attaques de jambes, ce dernier rivalisait bien avec le Parisien, qui ne s’affolait pas et plaçait rageusement sa hanche après avoir esquivé l’attaque adverse après plus de six minutes d’opposition. Le doigt pointé vers le banc des Français, Riner intimait l’ordre à la toute jeune Sarah-Léonie Cysique, médaillée d’argent en -57kg en début de semaine, de conclure ce rêve éveillé. Ce qu’elle faisait en prenant vite l’avantage au tableau, d’un waza-ari qu’elle parvenait à conserver jusqu’au gong libérateur. Comme tout le reste de la délégation bleu-blanc-rouge, Romane Dicko et Teddy Riner pouvaient exploser de joie. Ils figureront à jamais en première place du palmarès de cette épreuve olympique par équipes mixtes, qui aura séduit par son format et sa dramaturgie. Battre l’invincible Japon chez lui restera comme l’un des moments forts de cette édition si particulière des Jeux de Tokyo, alors que le monde du judo salive déjà de la revanche programmée à Paris dans trois ans !

EDF Dicko Riner JO Tokyo (juillet 2021)Titulaires indiscutables de cette équipe de France championne olympique, Romane Dicko et Teddy Riner repartent ainsi avec de l'or et du bronze du Japon. © Paco Lozano / L'Esprit du Judo