Tripy Makonda : « Porter ce maillot au Parc, il n'y a rien de plus magique ! »
Comme chaque semaine, les médias du club retrouvent un ancien joueur passé par le Centre de Formation du Paris Saint-Germain. Direction le Camp des Loges, où il est venu se ressourcer, pour prendre des nouvelles de Tripy Makonda (génération 1990), qui revient sur son actualité et sur ses années parisiennes.
Son arrivée au Paris Saint-Germain
« J'ai signé ma première licence à Paris en 2002. J'évoluais auparavant à l'AC Boulogne-Billancourt. J'ai intégré en tant qu'interne le Centre de Préformation basé à la Batellerie de Conflans. Mes débuts se sont relativement bien passés. Les quelques difficultés rencontrées n'en étaient pas pour moi car je mesurais la chance qui m'était donnée de pouvoir revêtir cette tunique qui me faisait tant rêver depuis tout jeune. Ayant vécu à Paris XVI, il m'arrivait de jouer au football dans un parc situé au pied du Parc des Princes. J'avais même été scolarisé l'année précédente en 6e dans le collège situé juste en face de la tribune Auteuil. Les soirs de matchs européens, j'ouvrais les fenêtres de notre logement pour entendre les clameurs du public ! Le PSG est et restera pour toujours mon club de coeur. Que cela soit l'esthétique du maillot, les grands joueurs passés comme Okocha ou bien le prestige du club, je ne pouvais que vivre à fond l'opportunité qui m'était offerte. »
Ses souvenirs du Centre de Préformation
« J'ai suivi une année à Conflans puis deux années à Verneuil. Nous arrivions tous de villes différentes, de différents clubs, avec des vécus différents. Il y avait entre autres Alexandre Letellier, Brice Dja Djédjé, Kévin Afougou, Maxime Partouche et Mamadou Sakho. Très rapidement, tous les jeunes ont compris que nous étions d'abord là pour défendre les couleurs d'un maillot avant de penser à soi-même. A l'issue de ma première saison, j'ai été surclassé avec les joueurs nés en 89. Ce fut le premier moment-clé de mon cursus d'apprentissage. Et comment ne pas oublier toutes nos batailles de polochons ! »
Son rapport à l'école
« L'école était secondaire dans mon esprit, car je ne voulais que jouer au football. Je ne pensais pas à devenir absolument un joueur pro, mais je voulais tout le temps être sur le terrain. J'aimais courir, respirer l'air, me dépenser ! En CM1, mon professeur avait écrit sur mon bulletin : "Si seulement Tripy pouvait être en classe comme il est dans la cours de récré". J'étais un enfant plein de joie, parfois directif, mais avec plein de copains. Je me contentais d'avoir la moyenne, sans pour autant avoir des avertissements pour mauvaise conduite. J'ai toujours été très respectueux, dans l'analyse, l'observation. Bien que mes résultats étaient mitigés, Mr Cholet mon professeur en CM2 m'a fait passer en 6e car il croyait en moi. Il m'a ouvertement dit ne pas vouloir briser mes rêves, je lui en serais reconnaissant pour toujours. Mon entrée au Centre de Préformation par la suite a été une sorte d'échappatoire pour des tas de raisons. En grandissant, j'ai compris que le simple fait de jouer au football n'était pas suffisant pour réussir ma vie d'homme. Etudier est une chance inestimable. »
Ses éducateurs les plus marquants au PSG
« Christian Mas a su créer un vrai collectif en U14 Fédéraux, une vraie cohésion de groupe. Nous étions tous un peu les "stars" de nos clubs respectifs avant de rejoindre Paris. Il nous a fait comprendre que l'équipe devait primer avant tout intérêt personnel. Il a su nous amener progressivement vers le foot à 11, tout en étant paternel et jovial. C'est un sacré personnage avec un humour fin et son accent du sud. Je me souviens que chaque mardi, il faisait venir le gardien de but Lionel Létizi (ndlr : 196 matchs au PSG, entre 2000 et 2006) pour nous donner des conseils. Sa présence fut une véritable source de motivation. François Gil m'a également marqué car j'ai vécu une première saison très compliquée sous sa coupe. Je suis revenu de vacances en étant blessé, alors qu'il nous avait formellement interdit de jouer avec nos potes. Il n'a pas apprécié ce manque de respect. Il a été dur avec moi, j'ai même songé à quitter le PSG car je le trouvais trop injuste du haut de mon jeune âge. Le fait d'être surclassé fut également un chamboulement pour moi. Étant très introverti, j'encaissais tout intérieurement. Sur le plan personnel ce n'était pas le top non plus, car ma famille et moi étions sans abri à cette période. Il m'est même arrivé de dormir dans la rue, avant d'aller d'hôtel en hôtel. Je ne l'avais pas dit à mes éducateurs. Un jour, mon coach m'a donné un ultimatum en me demandant de performer lors du tournoi international du Camp des Loges. J'ai marqué un corner rentrant en finale contre Metz. Lorsque nous avons soulevé le trophée sur le podium, il m'a glissé à l'oreille que le club me gardait. J'ai même été élu dans le onze type. Suite à cela, je lui ai tout avoué concernant ma vie personnelle. Il a fait une sorte de mea-culpa, tout en m'expliquant sa pédagogie qui était basée sur certaines valeurs outrepassées. Je sais qu'il n'avait rien de personnel contre moi, mais c'était plus difficile à vivre pour ma maman. Tout est rentré dans l'ordre, car nous avons été relogés et j'ai réalisé une seconde superbe saison avec François Gil qui m'a énormément appris en terme de football. Tout comme Jean-Luc Vasseur en U16 Nationaux qui possède un management tourné vers le collectif et le souci du détail. Sous sa coupe je me suis révélé en tant que milieu de terrain buteur, étant positionné dans le couloir gauche. J'ai beaucoup joué, énormément progressé et convaincu le coach des U18 de m'intégrer à son groupe. »
Son premier trophée remporté avec Paris
« Depuis tout petit, j'ai été habitué à jouer au football avec des plus grands que moi. Quand je me suis retrouvé surclassé avec la génération 87, parmi les Chantôme, Mulumbu, Mabiala, Reine-Adelaïde ou bien Harrouard, sous la coupe de David Bechkoura, j'étais déterminé à l'idée de tout faire pour rester avec eux le plus longtemps possible. J'ai fait une seule et unique apparition contre Brétigny en championnat U18. Lors de la demi-finale du championnat de France, je n'étais pas sur la feuille de match contre le Toulouse FC de Capoue et Tabanou. Une fois la qualification en poche, je me suis retrouvé avec surprise dans le groupe pour disputer la finale face à l'AS Monaco des Mollo, Zola, Mongongu et Bakar. J'avais trois ans de moins que la plupart des joueurs alignés ! Lors de cet ultime match, le coach m'a envoyé à l'échauffement en seconde période alors que nous menions 2-0. Les supporters m'ont fait comprendre qu'il m'appelait depuis cinq bonnes minutes pour me faire entrer en jeu ! Je n'y croyais pas ! Il a su trouver les bons mots pour me rassurer et c'est ainsi que j'ai rejoint David Ngog en attaque, qui était le meilleur Titi du moment. J'étais une sorte d'anomalie, car voir un aussi jeune joueur sur la pelouse ça n'existait pas dans les années 2000. Au coup de sifflet final, je me souviens des pleurs de joie mais aussi de tristesse car pour certains il s'agissait de leur dernier match au PSG. Sur le moment, je n'ai pas trop réalisé car je n'avais qu'une idée en tête, c'était de rester avec ce groupe, sans faire offense à ma propre génération. »
Son premier match professionnel
« C'était le 18 février 2009 en Coupe UEFA (ex-UEFA Europa League) contre Wolfsburg au Parc des Princes. Le coach Paul Le Guen m'a titularisé au milieu de terrain avec Clément Chantôme. C'est l'émotion la plus forte que j'ai ressentie en tant que footballeur, pas encore pro ! Il y avait près de 30 000 spectateurs et en face il y avait le duo Dzeko-Grafite qui faisait des ravages en Bundesliga. Il y avait mes potes dans le virage Auteuil, mais également mes parents. La cerise sur le gâteau fut notre victoire (2-0). J'avais travaillé tellement dur pour vivre cet instant. Des joueurs comme Péguy Luyindula, Claude Makélélé, Grégory Coupet ou bien Mamadou Sakho m'avaient super bien intégré dans le groupe. Malgré cela je n'avais trouvé le sommeil que vers 5-6 heures du matin la nuit précédente tellement j'étais stressé ! Mais pendant le match, les gars ont tout fait pour me détendre à l'image de Guillaume Hoarau qui n'arrêtait pas de me chambrer. Porter le maillot rouge et bleu au Parc, il n'y a rien de plus magique ! »
Son premier contrat professionnel
« Une seconde date que je n'oublierai jamais : le 22 juin 2009. J'avais travaillé très dur pour y parvenir. Mes proches et mes amis étaient présents le jour de ma signature. C'était une sorte de soulagement mais surtout le réel commencement de ma carrière, car le futur m'a fait comprendre que le plus important était le second voire le troisième contrat car ils m'ont permis de m'installer plus durablement au très haut niveau. Mon émotion ressentie lors de ma première apparition en pro fut toutefois plus forte que cet évènement. »
Son principal regret à Paris
« Peut-être le fait de ne pas avoir été champion de France de L1 avec mon club formateur. Mon storytelling aurait été fou ! J'ai disputé 27 matches professionnels avec Paris, j'y ai signé mon premier contrat pro. J'ai participé à la Coupe d'Europe et porté le maillot de l'Équipe de France chez les jeunes. Je ne conserve que d'excellents souvenirs. Un autre regret me vient en mémoire, celui de ne pas avoir été aux côtés de mon ami Mamadou Sakho lorsqu'il a soulevé la Coupe de France remportée au Stade de France en 2010. Je n'étais malheureusement pas retenu dans le groupe qui avait remporté la finale contre Monaco. »
Les joueurs qui ont le plus marqué son esprit
« Incontestablement, Mamadou Sakho. Pourtant il est de ma génération, mais il avait une telle maturité qu'il était respecté de tous les Titis. Depuis très jeune, il voulait devenir footballeur professionnel et rien d'autre. Là où moi je ne pensais qu'à prendre du plaisir en jouant au ballon. Lors des entraînements, il adoptait un tempérament de guerrier, il était tout le temps à fond ! Il a rapidement gravi les échelons au point de devenir le plus jeune capitaine dans l'histoire du PSG et de la Ligue 1. Ensuite, je vais citer Maxime Partouche, lui aussi né en 90. Il possédait une science du football très avancé pour son jeune âge et une technique au-dessus de la moyenne. Sa famille m'a également accueilli dans une période où j'en avais vraiment besoin, sans qu'elle ne sache la vérité sur ma vie. J'en profite pour les remercier. Même s'il n'a fréquentait que le Centre de Préformation du club, Yacine Brahimi était capable de changer le cours d'un match à lui tout seul. Lui aussi possédait une technique hors norme et une immense sympathie. Lorsque j'ai intégré le groupe pro, le brésilien Nenê m'a littéralement scotché par son jeu tout en finesse, pas spécialement rapide, mais d'une précision chirurgicale. Stéphane Sessegnon était pas mal non plus, mais avec un jeu plus en puissance. Mais si je dois en placer un tout en haut, c'est Claude Makélélé. Le vieux père ! Sa gestion de l'effort était impressionnante, tout comme son comportement des plus exemplaires. Lors du Tournoi de Paris en 2010, nous avions affronté le FC Porto. Je suis entré à la 20e minute de jeu pour remplacer Jean-Eudes Maurice blessé. Sur mon premier duel, Moutinho m'a balancé au sol, ce qui ne m'a pas plu. Après avoir levé les bras, Claude m'a dit assez sèchement : "Fais-toi respecter petit !". Il a su créer en moi un déclic qui m'a poussé à me surpasser à chaque apparition en pro, car je ne voulais surtout pas le décevoir. »
Educateur auprès des U11 de l'association PSG
« Cela faisait très longtemps que j'avais envie de transmettre, même lorsque j'étais encore en activité. Dans tous les clubs où j'ai évolué, les jeunes ont toujours eu tendance à me demander des conseils. Ayant toujours eu le souci du détail, j'aimais leur apporter mon expertise sur le jeu mais également sur l'attitude à adopter en dehors du terrain. Au fil des années, j'ai senti que ma voix pouvait avoir un impact auprès des nouvelles générations. C'est ainsi que j'ai endossé tout naturellement la panoplie d'éducateur tout en passant mes diplômes. Depuis la saison dernière, je prends un immense plaisir au contact des jeunes rouge et bleu. Le foot c'est bien, mais je suis davantage focus sur les notions de collectivité. Je souhaite que les enfants face preuve de solidarité dans le jeu mais principalement en dehors du terrain. Au-delà de former de bons petits footballeurs, je souhaite former de bons gamins. Mes maîtres-mots sont exigence, valorisation et recadrage. Mon objectif principal est de leur transmettre toutes les bonnes valeurs que j'ai moi-même reçues lors de mon parcours d'apprenti footballeur au club. »
La place des jeunes au club
« Depuis de nombreuses années, la place des jeunes formés au club n'a fait que s'accroître. La preuve parfaite est le Campus PSG qui a été pensé de manière à ce que les Titis puissent avoir un projet sur le long terme. Le chemin démarre par l'Association, puis le Centre de Préformation, en passant par le Centre de Formation et enfin par le groupe professionnel. Des joueurs comme Warren Zaïre-Emery et Senny Mayulu sont les parfaits exemples de cette réussite. Luis Enrique n'hésite pas du tout à utiliser les jeunes ce qui est un signal positif envoyé à tous les pensionnaires. A eux d'être performant quand l'occasion se présente, comme nous on se devait de l'être à l'époque ! »
PROFIL
Date de naissance : 24 janvier 1990
Lieu de naissance : Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne)
Poste : défenseur
Clubs successifs : Nicolaite de Chaillot Paris (1995 à 1998), EAC Boulogne-Billancourt (1998 à 2002), Paris Saint-Germain (2002 à 2011), Stade Brestois 29 (2011 à 2015), Académica de Coimbra (2015 à 2017), AS Poissy (2018 à 2019), FC Blue Boys Muhlenbach (2019 à 2020), Hamm Benfica (2020 à 2021)
Palmarès avec les jeunes du Paris Saint-Germain : champion de France U18 (2006)
Équipe de France : U18 (3 sélections), U19 (9 sélections, 1 but), U20 (3 sélections), Espoirs (5 sélections)
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