Teddy Riner voit plus loin que la défaite

Si l’histoire retiendra que la série d’invincibilité de Teddy Riner s’est arrêtée à 154 combats ce dimanche 9 février à l’AccorHotels Arena, l’important est ailleurs pour le décuple champion du monde du PSG Judo, déjà focalisé sur les cinq mois et demi qui le séparent des Jeux olympiques de Tokyo.

Une fois n’est pas coutume, c’est sans médaille autour du cou que s’est présenté Teddy Riner en zone mixte dans les coulisses de l’AccorHotels Arena. La faute à ce troisième tour perdu contre le « petit » gaucher Japonais Kokoro Kageura, celui-là même qui l’avait poussé à batailler pendant près de dix minutes il y a quatre mois à Brasilia. Pas forcément dans un grand jour pour ses deux premiers passages dans l’arène – victoires aux pénalités contre le Hongrois Richard Sipocz, médaillé mondial juniors en 2019, puis sur ippon contre l’Autrichien Stephan Hegyi – le Parisien se faisait surprendre sur sa propre initiative en uchi-mata (fauchage par l’intérieur de la cuisse), parfaitement lue par le Nippon qui anticipait et envoyait le Français sur le dos et aux vestiaires.

Un scénario que ne regrette pas vraiment Riner à l’heure du bilan. « J’ai attaqué alors que je n’aurais peut-être pas dû engager cette technique-là, j’étais peut-être mal placé… Le haut niveau, c’est un tout : il faut être bien mentalement, avoir le judo, l’agressivité, l’explosivité. Il y a certainement quelque chose qui a manqué, et on va le trouver en débriefant avec tout le staff. Il va falloir que l’on se remette tous ensemble en question, chacun dans son domaine, pour comprendre le pourquoi du comment. Mais nous avons encore le temps, il y a cinq mois à bien préparer, et c’est tant mieux que ce soit arrivé aujourd’hui. Ça me met dans un autre état d’esprit car je n’ai plus ce compteur d’invincibilité au-dessus de moi. Je vais pouvoir mieux travailler, sans me dire que je dois gagner encore tant de combats pour battre le record de Yasuhiro Yamashita (203 victoires consécutives, NDLR), surtout que le record qui m’intéresse vraiment, c’est celui de Tadahiro Nomura (seul judoka de l’histoire à détenir trois titres olympiques, NDLR). L’objectif, je vous l’ai toujours dit, ça reste Tokyo. Et d’ici là, il y a encore d’autres compétitions, beaucoup d’heures d’entraînement. Chaque adversaire que je vais avoir face à moi d’ici Tokyo, ça va être un ton au-dessus parce que je vais me remettre au travail. »

Peu habitué à voir perdre son protégé, l’entraîneur national Franck Chambily tient lui aussi à garder le positif de cette contreperformance. « Je le connais, Teddy est revanchard, et c’est peut-être bien placé de perdre aujourd’hui dans sa préparation des Jeux. S’il est encore un peu lourd par rapport à son poids de forme, s’il reste un peu planté dans le tapis, en manque de vélocité et de vivacité dans les jambes, il continue de monter en puissance depuis sa reprise de l’an passé. Aujourd’hui, il faut dire bravo à Kageura, qui l’a bien senti venir et l’a parfaitement piégé dans le temps. Tous les records sont aussi faits pour être battus, et l’important est de savoir rebondir. Mais avec cette double échéance olympique – l’épreuve individuelle et le par équipes – qui va l’animer jusqu’à cet été, je n’ai pas de doute sur la question. » Premiers éléments de réponse dans moins d’un mois sans doute, à l’occasion du Grand Prix de Rabat où il a annoncé s’aligner, sans exclure d’autres participations d’ici la fin de la phase de qualification olympique (31 mai 2020, NDLR) pour assurer sa place aux Jeux.